Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/328

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les différentes provinces de France les ſoixante mille ouvriers courbés ſur des métiers de la fabrique des étoffes de Lyon, & vous anéantirez le goût qui ne ſe ſoutient que par la concurrence d’un grand nombre de rivaux, ſans ceſſe occupés à ſe ſurpaſſer. La perfection des étoffes veut qu’elles ſe fabriquent dans une ville, où l’on peut réunir à la fois les bonnes teintures avec les beaux deſſins ; l’art de filer les laines & les ſoies, à l’art de tirer l’or & l’argent. S’il faut dix-huit mains pour former une épingle, par combien d’arts & de métiers a dû paſſer un habit galonné, une veſte brodée ? Comment trouver au fond d’une province intérieure & centrale, l’attirail immenſe des arts qui ſervent à l’ameublement d’un palais, aux fêtes d’une cour ? Reléguez donc, ou retenez dans les campagnes les arts innocens & ſimples qui vivent iſolés. Fabriquez dans les provinces les draps communs qui habillent le peuple. Établiſſez entre la capitale & les autres villes une dépendance réciproque de beſoins ou de commodités, des matières & des ouvrages. Mais encore n’établiſſez rien, n’ordonnez rien ; laiſſez agir