Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/56

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ne ſe livre-t-elle pas au jeu, au vin, à la débauche, à l’uſage immodéré des liqueurs fortes ? Peut-on introduire de bonnes mœurs malgré le climat ? Eſt-il poſſible que des peuples barbares ſe civiliſent ſans avoir des mœurs ?

L’immenſe étendue de l’empire, qui embraſſe tous les climats depuis le plus froid juſqu’au plus chaud, n’oppoſe-t-elle pas un puiſſant obſtacle au légiſlateur ? Un même code pourroit-il convenir à tant de régions diverſes ; & la néceſſité de pluſieurs codes n’eſt-elle pas la même choſe que l’impoſſibilité d’un ſeul ? Conçoit-on le moyen d’aſſujettir à une même règle des peuples qui, ne s’entendent pas, qui parlent dix-ſept à dix-huit langues différentes, & qui gardent de tems immémorial des coutumes & des ſuperſtitions auxquelles ils ſont plus attachés qu’à leur vie même ?

L’autorité s’affoibliſſant à meſure que les ſujets s’éloignent du centre de la domination, ſe fait-on obéir à mille lieues de l’endroit d’où partent les ordres ? Si l’on me répond que la choſe eſt poſſible par l’action des agens du gouvernement, je répliquerai par