Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v2.djvu/257

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payes, ne manquèrent pas de faire enfermer dans leurs magaſins une partie de cette récolte, déjà inſuffiſante.

On les accuſa d’avoir abusé de cette précaution néceſſaire, pour exercer le plus odieux, le plus criminel des monopoles. Il ſe peut bien que cette manière horrible de s’enrichir tentât quelques particuliers : mais que les principaux agens de la compagnie, que le conſeil de Calcutta eut adopté, eût ordonné cette opération deſtructive ; que pour gagner quelques millions de roupies à la compagnie, il dévouât froidement des millions d’hommes à la mort, & à la mort la plus cruelle. Non, nous ne le croirons jamais. Nous oſons même dire que cela eſt impoſſible, parce qu’une pareille atrocité ne ſauroit entrer tout à la fois dans la tête & dans le cœur de pluſieurs hommes, qui délibèrent & qui agiſſent pour les intérêts des autres.

Cependant le fléau ne tarda pas à ſe faire ſentir dans toute l’étendue du Bengale. Le riz, qui ne valoit communément qu’un ſol les trois livres, augmenta graduellement au point de ſe vendre juſqu’à quatre ſols la livre,