Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v3.djvu/192

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l’année ſuivante il m’imiteroit. Je ne diroi5 pas à un peuple eſclave, ſois libre ; mais je lui mettrois devant les yeux les avantages de la liberté, & il la déſireroit.

Je me garderois bien de charger mes tranſfuges des premières dépenſes que j’aurois faites pour eux. Je me garderois bien davantage de rejeter ſur les ſurvivans, la dette prétendue de ceux qui mourroient ſans l’avoir acquittée. Cette politique ſeroit auſſi fauſſe qu’inhumaine. L’homme de vingt, de vingt-cinq, de trente ans, qui vous porte en don ſa perſonne, ſes forces, ſes talens, ſa vie, ne vous gratifie-t-il pas aſſez ? Faut-il qu’il vous paie la rente du don qu’il vous fait ? Lorſqu’il ſera opulent, alors vous le traiterez comme votre ſujet : encore attendrez-vous la troiſième ou quatrième génération, ſi vous voulez que votre projet proſpère, & amener vos peuples à une condition dont ils auront eu le tems de connoître les avantages.

Ce plan eſt, à peu de choſe près, celui qu’adopta Catherine, à ſon avènement au trône. Quarante mille Allemands, séduits par les avantages immenſes qu’on leur offroit, prirent en 1764 & en 1765 la route de la