Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v3.djvu/273

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
Histoire philosophique
259

N’eſt-ce pas la même choſe que ſi j’y avois porté nos productions en nature ? Je pars d’Europe avec des marchandiſes de manufactures nationales. Je les vais changer dans la mer du Sud contre des piaſtres. Je porte ces piaſtres aux Indes. J’en rapporte des choſes utiles ou agréables. Ai-je rétréci l’induſtrie de l’état ? Non, j’ai étendu la conſommation de ſes produits, & j’ai multiplié les jouiſſances. Ce qui trompe les gens prévenus contre le commerce des Indes, c’eſt que les piaſtres arrivent en Europe avant d’être tranſportées en Aſie. En dernière analyſe, que l’argent ſoit ou ne ſoit pas employé comme gage intermédiaire, j’ai échangé directement ou indirectement avec l’Aſie, des choſes uſuelles contre des choſes uſuelles, mon induſtrie contre ſon induſtrie, mes productions contre ſes productions.

Mais, s’écrient quelques eſprits chagrins, l’Inde a englouti dans tous les tems les tréſors de l’univers. Depuis que le haſard a donné aux hommes la connoiſſance de la métallurgie, diſent ces cenſeurs, on n’a ceſſé de cultiver cet art. L’avarice, pâle, inquiète, n’a pas quitté ces rochers ſtériles, où la nature