Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v3.djvu/369

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cher la célébrité que ſon génie & ſes travaux lui avoient acquiſe. Sa vie fut un contraſte perpétuel d’élévation & d’abaiſſement. Toujours en bute aux complots, aux calomnies, à l’ingratitude des particuliers, il eut encore à ſoutenir les caprices d’une cour fière & orageuſe, qui, tour-à-tour, le récompenſoit & le puniſſoit, le réduiſoit à d’humiliantes juſtifications, & lui rendoit ſa confiance.

La prévention du miniſtre d’Eſpagne, contre l’auteur de la plus grande découverte qui eût jamais été faite, alla ſi loin, qu’on envoya dans le Nouveau-Monde un arbitre pour juger entre Colomb & ſes ſoldats. Bovadilla, le plus avide, le plus injuſte, le plus féroce de tous ceux qui étoient paſſés en Amérique, arrive, en 1500, à Saint-Domingue ; dépouille l’amiral de ſes biens, de ſes honneurs, de ſon autorité, & l’envoie en Europe chargé de fers. L’indignation publique avertit les ſouverains que l’univers attend, ſans délai, la punition d’un forfait ſi audacieux, la réparation d’un ſi grand outrage. Pour concilier les bienséances avec leurs préjugés, Iſabelle & Ferdinand rap-