Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v4.djvu/40

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coup de patience, lui répondit : Je veux bien être l’ami du roi d’Eſpagne, mais non ſon tributaire ; il faut que le pape ſoit d’une extravagance extrême, pour donner ſi libéralement ce qui n’eſt pas à lui. Je ne quitte pas ma religion pour une autre ; & ſi les chrétiens adorent un Dieu mort ſur une croix, j’adore le ſoleil qui ne meurt jamais. Il demande enſuite à Vincent où il a pris tout ce qu’il vient de dire de Dieu & de la création. Dans ce livre, répond le moine, en préſentant ſon bréviaire à l’empereur. Atabaliba prend le livre, le regarde de tous les côtés, ſe met à rire, & jettant le bréviaire : Ce livre, ajoute-t-il, ne me dit rien de tout cela. Vincent ſe tourne alors vers les Eſpagnols, en leur criant de toutes ſes forces : Vengeance, mes amis, vengeance. Chrétiens, voyez-vous comme il mépriſe l’évangile ? tuez-moi ces chiens, qui foulent aux pieds la loi de Dieu.

Les Eſpagnols, qui, vraiſemblablement, avoient peine à retenir cette fureur, cette ſoif de ſang, que leur inſpiroit la vue de l’or & des infidèles, obéirent au dominicain. Qu’on juge de l’impreſſion que durent faire ſur les Péruviens la vue des chevaux qui les