Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v5.djvu/298

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Laurent, monté ſur un très-petit bâtiment ; eſt ſurpris par deux vaiſſeaux Eſpagnols, l’un & l’autre de ſoixante canons. Vous êtes, dit-il à ſes camarades, trop expérimentés pour ne pas connoitre le péril que nous courons, & trop braves pour le craindre. Il faut ici tout ménager & tout haſarder, ſe défendre & attaquer en même-tems. La valeur, la ruſe, la témérité, le déſeſpoir même : tout doit être mis en uſage dans cette occaſion. Redoutons l’ignominie, redoutons la barbarie de nos ennemis ; & pour leur échapper, combattons.

Après ce diſcours, reçu avec acclamation, il appelle le plus intrépide des Flibuſtiers, & lui ordonne publiquement de mettre le feu aux poudres au premier ſignal qu’il lui en fera ; témoignant par cette réſolution qu’il n’y a de ſalut que dans la mort même, ou dans le courage. Montrant enſuite de la main les ennemis : c’eſt entre leurs bâtimens, dit-il qu’il nous faut paſſer, & tirer à droite & à gauche comme vous ſavez faire. Ce mouvement eſt exécuté avec une rapidité, une réſolution extraordinaires. On ne prend pas à la vérité les bâtimens, mais on en éclaircit ſi bien les équipages, qu’ils ne peuvent ou