Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v5.djvu/350

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que je ne daignerai pas m’y arrêter. La queſtion ſe réduit à ces deux mots : Vaut-il mieux qu’un peuple ſoit éternellement abruti que d’être quelquefois turbulent ? Souverains, voulez-vous être méchans ? Laiſſez écrire ; il ſe trouvera des hommes pervers qui vous ſerviront ſelon votre mauvais génie & qui vous perfectionneront dans l’art des Tibères. Voulez-vous être bons ? Laiſſez encore écrire ; il ſe trouvera des hommes honnêtes qui vous perfectionneront dans l’art des Trajans. Combien il vous reſte de choſes à ſavoir pour être grands, ſoit en bien, ſoit en mal !

La populace de Londres, la plus vile populace de l’univers, comme le peuple Anglois, conſidéré politiquement, eſt le premier peuple du monde, ſoutenue de vingt mille jeunes gens de famille élevés dans le négoce, aſſiège par des cris & par des menaces le sénat de la nation, & règle ſes délibérations. Souvent ces clameurs ſont excitées par une faction du parlement lui-même. Ces hommes mépriſables, une fois émus, inſultent le meilleur citoyen, qu’on a réuſſi à leur rendre ſuſpect, incendient ſa maiſon, & inſultent ſcandaleuſement les têtes