Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v5.djvu/96

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confluent de ces deux rivières. Chaque miſſionnaire, accompagné d’un ſeul homme de ſa nation, ſe chargeoit de haches, de couteaux, d’aiguilles, de toutes ſortes d’outils de fer, & s’enfonçoit dans des forêts impénétrables. Il paſſoit les mois entiers à grimper ſur les arbres, pour voir s’il ne découvrirait pas quelque cabane, s’il n’apercevroit pas de la fumée, s’il n’entendroit pas le ſon de quelque tambour ou de quelque fifre. Dès qu’il s’étoit aſſuré qu’il y avoit des ſauvages au voiſinage, il s’avançoit vers eux. La plupart fuyoient, ſur-tout s’ils étoient en guerre. Ceux qu’il pouvoit joindre, ſe laiſſoient séduire par les ſeuls préſens dont leur ignorance leur permît de faire cas. C’étoit toute l’éloquence que le miſſionnaire pût employer, & dont il eût beſoin.

Lorſqu’il avoit raſſemblé quelques familles, il les conduiſoit dans des lieux qu’il avoit choiſis pour former une bourgade. Rarement réuſſiſſoit-il à les y fixer. Accoutumés à de continuels voyages, ils trouvoient inſupportable de ne jamais changer de demeure.

L’état d’indépendance où ils avoient vécu, leur paroiſſoit préférable à l’eſprit de ſociété