Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v6.djvu/216

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d’avoir recueilli le fruit de ſes avances. Cet inconvénient fît qu’on exigea des baux de pluſieurs années. Ils s’étendirent dans la ſuite à la vie entière du cultivateur ; & ſouvent ils furent aſſurés à ſa poſtérité la plus reculée. Alors finit la ſervitude réelle.

Ce grand changement, qui ſe faiſoit, pour ainſi dire, de lui-même, fut précipité par une cauſe qui mérite d’être remarquée. Tous les gouvernemens de l’Europe étoient ariſtocratiques. Le chef de chaque république étoit perpétuellement en guerre avec ſes barons. Hors d’état, le plus ſouvent, de leur réſiſter par la force, il étoit obligé d’appeler les ruſes à ſon ſecours. Celle que les ſouverains employèrent le plus utilement fut de protéger les eſclaves contre la tyrannie de leurs maîtres, & de ſaper le pouvoir des nobles, en diminuant la dépendance de leurs ſujets. Il n’eſt pas, ſans vraiſemblance, que quelques rois favorisèrent la liberté par le ſeul motif d’une utilité générale : mais la plupart furent viſiblement conduits à cette heureuſe politique, plutôt par leur intérêt perſonnel que par des principes d’humanité & de bienfaiſance.