Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v6.djvu/89

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le voyageur eſt ignorant ou menteur. Celui qui a reçu le génie en partage, dédaigne les détails minutieux de l’expérience ; & le faiſeur d’expériences eſt preſque toujours ſans génie. Entre la multitude des agens que la nature emploie, nous n’en connoiſſons que quelques-uns, & encore ne les connoiſſons-nous qu’imparfaitement. Qui ſait ſi les autres ne ſont pas de nature à échapper pour jamais à nos ſens, à nos inſtrumens, à nos obſervations & à nos eſſais ? La nature des deux êtres qui compoſent le monde, l’eſprit & la malatière, ſera toujours un myſtère.

Entre les qualités phyſiques des corps, il n’y en a pas une ſeule qui ne laiſſe une infinité d’expériences à faire. Ces expériences même ſont-elles toutes poſſibles ? Combien de tems en ſerons-nous réduits à des conjectures qu’un jour verra éclore & que le lendemain verra détruites ? Qui donnera un frein à ce penchant preſque invincible à l’analogie, manière de juger ſi séduiſante, ſi commode & ſi trompeuſe ? À peine avons-nous quelques faits, que nous bâtiſſons un ſyſtême qui entraîne la multitude & ſuſpend la recherche de la vérité. Le tems