Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v7.djvu/153

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s’en nourrir. Pluſieurs qui avoient été eſclaves à Alger, déteſtèrent la main qui avoit brisé leurs fers ; tous maudiſſoient leur exiſtence. C’eſt ainſi qu’ils expièrent le crime de leur invaſion, juſqu’à ce que le gouvernement d’Aubert eut amené la paix avec les ſauvages, à la fin de 1640. Quand on penſe à l’injuſtice des hoſtilités que les Européens ont commiſes dans toute l’Amérique, on eſt tenté de ſe réjouir de leurs déſaſtres, & de tous les fléaux qui ſuivent les pas de ces féroces oppreſſeurs. L’humanité, briſant alors tous les nœuds du ſang & de la patrie qui nous attachent aux habitans de notre hémiſphère, change de liens, & va contrarier au-delà des mers, avec les ſauvages Indiens, la parenté, qui unit tous les hommes, celle du malheur & de la pitié.

XXVIII. La Guadeloupe fort peu-à-peu de la misère : mais ne devient une colonie floriſſante qu’après avoir été conquiſe par l’Angleterre.

Cependant, le ſouvenir des maux qu’on avoit éprouvés dans une iſle envahie, excita puiſſamment aux cultures de première néceſſité, qui amenèrent enſuite celles du luxe de la métropole. Le petit nombre d’habitans, échappés aux horreurs qu’ils avoient méritées, fut bientôt groſſi par quelques colons de Saint-Chriſtophe, mécontens de leur ſituation ; par des Européens, avides de