Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v7.djvu/487

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Quoique les François, inſtruits de la fertilité de la Grenade, euſſent formés dès l’an 1638 le projet de s’y établir, ils ne l’exécutèrent qu’en 1651. En arrivant, ils donnèrent quelques haches, quelques couteaux, un baril d’eau-de-vie au chef des ſauvages qu’ils y trouvèrent ; & croyant à ce prix avoir acheté l’iſle, ils prirent le ton de ſouverains, & bientôt agirent en tyrans. Les Caraïbes, ne pouvant les combattre à force ouverte, prirent le parti que la foibleſſe inſpire toujours contre l’oppreſſion, de maſſacrer tous ceux qu’ils trouvoient à l’écart & ſans défenſe. Les troupes qu’on envoya pour ſoutenir la colonie au berceau, ne virent rien de plus sûr, de plus expéditif, que de détruire tous les naturels du pays. Le reſte des malheureux qu’ils avoient exterminés, ſe réfugia ſur une roche eſcarpée, aimant mieux ſe précipiter tout vivans de ce ſommet, que de tomber entre les mains d’un implacable ennemi. Les François nommèrent légèrement ce roc, le morne des ſauteurs, nom qu’il conſerve encore.

Comment ce peuple frivole perdroit-il dans des contrées éloignées le ton de plai-