Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/294

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tion mâle & toute militaire, les endurciſſoit de bonne-heure à la fatigue, & les familiariſoit avec le danger. À peine ſortis de l’enfance, on les voyoit parcourir un continent immenſe, l’été en canot, l’hiver à pied, au travers des neiges & des glaces. Comme ils n’avoient qu’un fuſil pour moyen de ſubſiſtance, ils étoient continuellement exposés à mourir de faim : mais rien ne les effrayoit, pas même le danger de tomber entre les mains des ſauvages, qui avoient épuisé tout leur génie à imaginer, pour leurs ennemis, des ſupplices, dont le plus doux étoit la mort.

Les arts sédentaires de la paix, les travaux ſuivis de l’agriculture, ne pouvoient pas avoir d’attrait pour des hommes accoutumés à une vie active, mais errante. La cour, qui ne voit ni ne connoît les douceurs & l’utilité de la vie ruſtique, augmenta l’averſion que les Canadiens en avoient conçue, en verſant excluſivement les grâces & les honneurs ſur les exploits guerriers. La nobleſſe fut l’eſpèce de diſtinction qu’on prodigua le plus, & qui eut des ſuites plus funeſtes. Non-ſeulement elle plongea les