Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/335

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vaines contemplations, remplacèrent les vertus actives & ſociales. Une vénération ſtupide pour des ſaints ignorés, étoit ſubſtituée au culte du premier être. Le merveilleux des miracles, étouffoit la connoiſſance des cauſes naturelles. Des prières ou des offrandes, expioient les forfaits les plus inhumains. Toutes les ſemences de la raiſon étoient altérées, tous les principes de la morale étoient corrompus.

Ceux qui avoient coopéré du moins à ce déſordre, en ſurent profiter. Les prêtres obtinrent un reſpect qu’on refuſoit aux rois ; leur perſonne devint ſacrée. Le magiſtrat perdit toute inſpection ſur leur conduite ; ils ſe dérobèrent à la vigilance de la loi civile. Leur tribunal éluda tous les autres, ou même les ſupplanta. Ils mêlèrent la religion à toutes les queſtions de juriſprudence, à toutes les matières d’état ; & devinrent arbitres ou juges de toutes les cauſes. Vouloit-on raiſonner ? la foi parloit, & tous écoutoient, en ſilence, ſes oracles inexplicables. Tel étoit l’aveuglement dans ces ſiècles, que les débauches ſcandaleuſes du clergé n’affoibliſſoient pas ſon autorité.