Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/52

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induſtrie. Ils rient de nos arts, de nos manières, de tous ces uſages, qui nous inſpirent plus de vanité, à meſure qu’ils s’éloignent plus de la nature. Leur franchiſe & leur bonne-foi, ſont indignées des fineſſes & des perfidies, qui ont fait la baſe de notre commerce avec eux. Une foule d’autres motifs, appuyés quelquefois ſur le préjugé, ſouvent ſur la raiſon, ont rendu les Européens odieux aux ſauvages. Ils ſont devenus, par repréſailles, durs & cruels envers nous. L’averſion & le mépris que nous leur avons fait concevoir pour nos mœurs, les ont toujours éloignés de notre ſociété. On n’a jamais pu façonner aucun d’eux aux délices de notre aiſance ; tandis qu’on a vu des Européens renoncer à toutes les commodités de l’homme civil, pour aller prendre dans les forêts l’arc & la maſſue de l’homme ſauvage.

Cependant un ſentiment inné de bienveillance, les ramène quelquefois à nous. Un bâtiment François s’étoit brisé, à l’entrée de l’hiver, ſur les rochers d’Anticoſti, Ceux des matelots qui, dans cette iſle déſerte & ſauvage, avoient échappé aux rigueurs des