Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/75

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cevoir la néceſſité d’un chef militaire. Des capitaines les ont toujours menés au combat ; & dans la préférence qu’ils leur accordoient, la phyſionomie étoit conſultée. Ce moyen de juger des hommes ſeroit peut-être défectueux & ridicule chez des peuples qui, formés dès l’enfance à contraindre leur air & tous leurs mouvemens, n’ont plus de phyſionomie, ſont pleins de diſſimulation & de paſſions factices. Mais le premier coup-d’œil ne trompe guère les ſauvages qui, guidés par la nature ſeule, en connoiſſent la marche. Après l’air guerrier, on cherche une voix forte ; parce que dans des armées qui marchent ſans tambours, ſans clairons pour mieux ſurprendre l’ennemi, rien n’eſt plus propre à ſonner l’alarme, à donner le ſignal du combat, que la voix terrible d’un chef qui crie & frappe en même tems. Mais ce ſont ſur-tout les exploits qui nomment un général. Chacun a droit de vanter ſes victoires, pour marcher le premier au péril ; de dire ce qu’il a fait pour prouver ce qu’il veut faire ; & les ſauvages trouvent qu’un héros balafré, qui montre ſes cicatrices, a très-bonne grâce à ſe louer.