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Page:Rebell - La Nichina, 1897.djvu/104

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— Qu’on nous livre le frère ou nous défonçons la porte, s’écriait-on.

— Monseigneur, dit Coccone, il faut absolument en finir. Si vous ne tenez pas à votre vie, vous avez le devoir de tenir à votre titre de légat de Sa Sainteté que ces brigands sont prêts à insulter en votre personne.

— Ma vie ! repartit le cardinal, oh ! ils n’oseraient s’y attaquer et, d’ailleurs, je saurai la défendre, mais ils sont capables, s’ils entrent ici, de me briser ma belle statue d’Antinoüs. Que faire, par Bacchus ! que faire ?

— Leur livrer cet indigne moine qu’ils réclament, et qui est la cause de tout ce tapage.

Le cardinal considéra un instant Arrivabene qui tremblait de tous ses membres.

— C’est une bête si amusante, dit-il.

— C’est un horrible paillard qui se roule avec volupté dans l’immondice.

— En tout cas, ce serait une bien lâche action, reprit Benzoni.

Mais il n’y avait plus à hésiter. Le peuple était allé chercher une poutre pour ébranler la porte. Encore quelques instants, et le palais serait envahi.

Soudain le cardinal eut un sourire.

— Si nous envoyions, dit-il, le frère Gennaro évangéliser cette canaille ? Il est bien capable de la convertir. Et, moine pour moine, le peuple ne s’apercevrait pas de l’échange.

— Ah ! monseigneur ! fit Coccone d’un ton de reproche.

— Arrivabene est soumis à ses instincts, je l’avoue, mais il me rend mille services, tandis que Gennaro, jusqu’ici, n’a jamais su que renverser mes vases, briser mes statues, trouer mes tableaux, et tout cela, sous prétexte de vertu. Enfin c’est un hérétique.