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Page:Rebell - La Nichina, 1897.djvu/233

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— Mais en quoi ai-je pu mériter ton ressentiment ? Je t’ai promis ma voix au prochain conclave. Je te la donnerai. Aie seulement un peu de patience et attends que Sa Sainteté ne soit plus de ce monde.

Ces paroles furent suivies de bruyants sanglots.

— Allons ! dit le cardinal, que signifient ces larmes ?

— Vous venez me railler, vous moquer de moi, disait-on au milieu de gémissements, vous me refusez une grâce que vous m’aviez toujours promis de m’accorder.

— Quelle grâce ! je ne sais ce que tu veux dire. Voyons, parle ! mais parle donc, imbécile !

— Apprenez-le, monseigneur : je ne suis entré dans les ordres que par désespoir de ne pas épouser la femme que j’aimais. Or, à présent, elle est veuve et me prendrait volontiers pour mari. Je n’ai donc plus de raison de rester dans un cloître.

— Et quelle est cette femme ?

— C’est une fille de Posellino, une tenancière du comte Marzio.

— Je reconnais là ton goût. Nos étreintes ne pouvaient te convenir : il te fallait une paysanne, qui sentît l’étable et le fumier.

— Taisez-vous. Je vous défends de vous moquer de ma fiancée.

— Ah ! vous êtes déjà fiancés ? Alors, c’est excellent. Tu t’enfroques et tu te défroques aussi vite qu’un acteur change de costume. Et c’est moi qui te sers de valet de chambre. Veux-tu, mon cher frère, que je tienne la chandelle ?

— Vous refusez de m’aider à sortir de ce cloître qui m’est plus dur qu’une geôle, plus douloureux qu’une chambre de torture, où je pleure des larmes de sang, où mes jours ressemblent à une agonie éternelle, eh bien ! soyez-en sûr : demain, quand vous partirez,