Courez chez le docteur Chiron. Ramenez-le ! Vous dépêcherez-vous, fainéantes !
Cependant Antoinette peu à peu reprit connaissance ; je vis ses paupières se relever lentement, les ailes de son nez palpiter ; ses lèvres en s’entr’ouvrant parurent me sourire.
— Mon enfant adorée ! m’écriai-je en la serrant contre mon cœur, et mes larmes vinrent rafraîchir son front et les ondulations souples de ses cheveux.
Lorsque le docteur entra et qu’il sut ce qui était arrivé :
— Eh bien, dit-il, on se fait enlever par les nègres à présent… Qu’est-ce que je vous disais, madame ?
À ces mots les yeux de la pauvre petite se remplirent de larmes.
— Ménagez-la, voyons, docteur ! cette enfant souffre !
Il observa le pouls d’un air détaché, puis laissant tomber la main :
— Un peu de fièvre. Ce ne sera rien. Les émotions sont bonnes pour la jeunesse, ajouta-t-il avec un rire stupide, et il ordonna, au hasard, quelque remède.
Il semblait enchanté comme si l’événement donnait raison à ses prophéties. Même l’enlèvement d’Agathe ne l’inquiétait pas.
— Bah ! elle reviendra ! Cette jeune fille avait évidemment des dispositions au libertinage.
— Vous êtes fou, docteur !
— Ma théorie est faite, madame : point n’enlève-