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LES NUITS CHAUDES DU CAP FRANÇAIS


esclaves. C’était un otage. Depuis elle n’a pas quitté cette maison. Un nègre à la porte, et un autre dans la cour l’empêchent, non seulement de sortir, mais encore de se montrer aux fenêtres. Je la garderai ainsi jusqu’à ce que la mère se décide enfin à laisser le gouverneur donner sa fille à Montouroy.

— Et quel est le second obstacle à vos projets ? lui demandai-je.

— Le second, c’est vous, en ne mariant pas Antoinette.

— Jamais, dis-je, jamais Antoinette ne se mariera : elle n’aura qu’un amour, le mien !

Le sang me montait à la face.

— C’est parfait, répliqua-t-elle, mais alors faites bonne garde. Un mari pourtant la protégerait mieux que vous.

— Mais c’est contre les maris, quels qu’ils soient, dis-je, que je veux la protéger. Au surplus quel pouvoir vous flattez-vous donc d’avoir, madame, pour oser donner des ordres à des gens qui vous sont inconnus ?

— Entrez ici, madame, dit à voix basse Dodue, qui entr’ouvrit une porte et souleva des tentures, ne soufflez mot, regardez et écoutez.

Elle m’avait poussée dans une sorte de petite loge obscure mais fermée par une glace, qui vous permettait de voir ce qui se passait dans la chambre voisine, sans laisser soupçonner votre présence ; par une fente assez large pratiquée dans la tapisserie, et que dissi-