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LES NUITS CHAUDES DU CAP FRANÇAIS


même de féroce ; le regard au contraire était plein d’une douceur insinuante. Jumilhac crut lui voir autour du cou une parure de corail : c’étaient des gouttelettes de sang qui coulaient d’une blessure toute fraîche ; on eût dit qu’une lame d’épée venait de lui entailler la peau légèrement. Ses yeux restaient encore rouges, et humides des pleurs qu’elle venait de répandre.

Elle alla s’étendre sur un sofa, et les bras rejetés en arrière, la tête appuyée contre les mains, la chevelure dénouée, elle regardait devant elle, en montrant ses dents brillantes.

Dubousquens était revenu en manteau et en bottes de voyage, prêt à partir. Quand il vit la négresse, une grande fureur l’emporta ; il la prit par les cheveux, et la poussa du sofa à coups de pieds. Elle s’abandonnait aux brutalités du maître sans paraître en éprouver aucune frayeur, et ne cessait de lui montrer les dents en un rire plein de dédain et qui semblait une menace de morsure.

— Misérable ! criait Dubousquens en la frappant. Oh ! je ne te laisserai pas ainsi. Il faut que je te tue !

— À quoi songez-vous ? dit Jumilhac, et il saisit le bras de Dubousquens qui se levait pour la battre encore. Quand vous êtes en danger d’être arrêté, ne pouvez-vous oublier vos querelles ? Tenez, écoutez !

La rue retentissait d’un long piétinement. Des pas s’arrêtèrent devant l’hôtel. Des crosses de fusil tombèrent sur le seuil. Une voix haute cria :