Je savais bien qu’elle insisterait. Je m’assis au bord de son lit, tout près d’elle.
— Vous avez vu aujourd’hui M. de Montouroy ?…
À ces paroles, Antoinette fut encore plus émue ; elle mit presque de la colère à me répondre :
— Oui, il a été ridicule comme toujours.
— Ridicule ! m’écriai-je, est-ce donc ridicule de vous trouver aimable, de se plaire auprès de vous ?
— Ah ! il me trouve aimable ! fit-elle en riant d’un rire forcé. Et moi je le trouve simplement insupportable.
— Ne vous conduisez pas en fillette, continuai-je d’un ton sévère ; je vous rappelle que M. de Montouroy est mon parent, que je le reçois chez moi : vous lui devez des égards. J’avouerai que j’avais des vues sur lui : M. de Montouroy n’est pas un vieillard ; c’est un brillant gentilhomme.
— Un fat ! dit Antoinette à demi-voix, et en haussant les épaules.
J’étais irritée ! je répliquai vivement :
— Vous répétez un mot d’Agathe ; maintenant vous jugez tout le monde d’après les impressions de votre amie.
Agathe de Létang est une de ces enfants dont l’aveugle tendresse d’une mère fait des révoltées, des envieuses ou des despotes. Habituées au plaisir comme à leur esclave, elle voudraient que tout pliât sous leurs caprices, jusqu’à la nature, jusqu’à l’existence. Agathe ne s’explique pas que Montouroy ait pu, au dernier bal de Mme Du Plantier, la faire