Page:Rebell - Les nuits chaudes du cap français, 1900.djvu/46

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
44
LES NUITS CHAUDES DU CAP FRANÇAIS


danser toute une nuit sans aussitôt s’éprendre d’amour pour elle. À présent, auprès de toutes ses amies, elle essaie de le rendre odieux. Je pensais bien qu’aux yeux d’Antoinette, cette aversion d’une camarade était le principal désavantage de Montouroy.

Cependant Antoinette me répondit :

— Personne ne m’a jamais parlé de M. de Montouroy, madame.

— Alors qu’avez-vous contre lui ?

— Il me déplaît.

— Antoinette, lui dis-je, je veux vous parler ce soir comme l’aurait fait votre pauvre mère. Il ne s’agit pas d’une fantaisie enfantine, mais de votre avenir. Vous devez déjà y songer. Que deviendrez-vous sans fortune ? Vous savez que mon affection pour vous, qui est très grande, ne correspond malheureusement pas à mes ressources d’argent, d’une médiocrité telle, que c’est à peine si j’ai pu vous venir en aide jusqu’ici, et que j’ignore même si plus tard j’en aurai les moyens.

Je lui mentais avec tranquillité. Mon Dieu, pardonnez-moi ! Si je fus criminelle autrefois je suis aujourd’hui décidée au bien. Peut-être de tout le mal que j’ai fait, naîtra-t-il une bonne action. Je ne puis oublier mes intérêts je le confesse, du moins ai-je le désir d’être utile à cette enfant.

Antoinette ne perdait aucune de mes paroles comme si chaque mot, tombé de mes lèvres, devait la perdre ou la sauver ; les battements précipités de son cœur soulevaient son sein dont l’éclat et la pléni-