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sur un voyage au tibet.

de se rendre à la Présidence : mais il eut le chagrin d’y trouver ses affaires dans le plus grand désordre ; le petit territoire qu’il avoit confié à Tchela, son fils adoptif, avoit été envahi, durant son absence, par Râdje Tchend, zémyndâr[1] du voisinage, qui s’étoit emparé, à force ouverte, de l’étendue de cinquante beygahs. Déterminé par ses sollicitations réitérées et pressantes, je me suis engagé à vous dire, en sa faveur, que toutes ses espérances reposent sur votre justice et sur votre protection ; il implore humblement votre appui pour rentrer dans ses droits, et pour jouir en sûreté de ce qui lui appartient. Vous pardonneriez sans doute la liberté de cette demande, quand bien même je ne parlerois pas en faveur d’un homme qui a rendu d’importans services au Gouvernement ; mais, quoique d’un intérêt secondaire, cet événement fournit un exemple authentique des dispositions usurpatrices des zémyndârs subalternes. Il est à propos de vous faire observer une autre circonstance. Le territoire en question fait partie d’un canton situé vis-à-vis de Calcutta, sur le rivage occidental du fleuve, et qui fut donné jadis, par un senned[2] du Gouvernement, au Tichou Lama, pour y fonder un temple et un hospice destinés aux pèlerins du Tibet qui visiteroient le fleuve sacré du Gange[3].

Après avoir, conformément à vos désirs, fait tous mes efforts pour traduire littéralement les informations que Pourounguyr a pu me donner, il ne me reste qu’à justifier la prolixité de ces notes. J’ai cru devoir entrer dans les moindres détails, parce qu’il m’a semblé que chaque circonstance, quelque insignifiante qu’elle fût, pouvoit intéresser jusqu’à un certain point, si elle donnoit une idée du caractère national

  1. وميندار tenancier d’une portion de terre qui relève immédiatement du gouvernement, et pour laquelle il paye une rente. (L-s.)
  2. سند papier, charte ou patente émanée d’un homme en place, et revêtue des signatures nécessaires. Quelques senned ne portent que le sceau du monarque ; d’autres sont revêtus des sceaux et des signatures des ministres d’état. On ajoute le sceau royal à quelques-uns ; on ne le met pas à d’autres. (L-s.)
  3. Les sectateurs du Lama ont aussi une grande vénération pour le Gange ; ce qui pourroit porter à regarder leur religion comme une corruption du brâhmanisme, si nous n’avions pas des preuves très-forte à l’appui de l’opinion opposée. (L-s.)