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NOTES.

Le Mérou y dont le nom signifie axe ou centre, est le pôle septentrional de la terre, et passe pour la plus haute des montagnes. Dans la mythologie indienne, il est représenté comme le séjour du soleil et le support de la terre.

Dans une rixe qui s’éleva entre les bons et les mauvais génies, au sujet de l’eau de l’immortalité, le Mérou fut précipité dans la mer, et tomba au plus profond de l’abîme. Les bons génies prièrent aussitôt Vichnou, conservateur du monde, de remettre cette montagne sur pied. Vichnou prit la forme d’une tortue, plongea et souleva la montagne, et la soutint sur son dos. Les dieux bons et méchans, voyant la montagne céleste ainsi hors de danger, l’enveloppèrent avec un immense serpent nommé Vasoughi, suivant le P. Paulin de Saint-Barthélemi, et Vasouki, suivant M. Wilkins ; et les démons prenant la tête du serpent, les dieux saisissant sa queue, ils le tirèrent alternativement, et par ce moyen imprimèrent au mont Mérou un mouvement de rotation qui dut en faire sortir l’eau de la vie. Il la rendit en effet, ou plutôt elle sortit de la mer ; et le médecin céleste Danouvandra recueillit cette eau éparse sur la mer, et la remit dans un vase à Vichnou, assis sur le sommet du mont Mérou. Ce dieu la distribua ensuite aux autres dieux bons, à l’exclusion des démons, qui, dès ce moment, leur jurèrent une haine éternelle. Tel est, en abrégé, le sujet d’un dessin du cabinet du savant et vénérable cardinal Borgia, prélat dont le nom est cher à tous les amis des lettres : ce sujet est gravé dans le Systema Brahmanicum du P. Paulin. On y remarque la figure du dieu Vichnou, répétée trois fois : 1.° sous la forme d’une tortue ; il soutient le inont Mérou : 2.° sous celle d’un dieu ou d’un homme ; il tire la queue du serpent : 3.° comme dieu, avec les attributs de la royauté, et assis sur une fleur de lotus, au sommçt du mont Mérou ; il a la face noire, la tête ceinte d’une couronne, et quatre mains, &c. Aussitôt après que ce dieu eut distribué aux autres l’eau de la vie, tirée de la mer, cet élément produisit la déesse Lakchmî, la mère universelle, la Vénus indienne, déesse de la génération et de la fécondité, la Terre, femme de Vichnou, laquelle est assise auprès de lui, avec une fleur de lotus ou nymphcea à la main. Dans le même moment naquit aussi Saresouatî ou Saravatî, déesse de l’harmonie et de l’éloquence, femme de Brâhmah, assise à la gauche de Vichnou. Enfin la même mer produisit Moudêvi (ou mieux Bhoudêvi), déesse de la turpitude et de la discorde. Outre ces trois déesses, on vit encore sortir de cette mer, la vache, symbole de la fécondité, le cheval à sept têtes, l’arbre Kalpavrkcham, et l’éléphant blanc, emblème du courage et de la prudence, qui soutint le monde, sauvé par Vichnou. De là encore la fable accréditée chez les Hindous, que la terre est portée sur une tortue