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Caractère national et vie littéraire. 53

Si je pousse un soupir froiil, je mits le feu :iu ciel ; si je fais pleuvoir des larmes cliauiles, je fais de la poussière un parterre de tulipes".

Telle est ce genre «le ixtôsie : des coiiii)Iainte.’^ extrava-

gantes où les nuits blanches et les larmes de sang, coulant comme l’Oxus ou le Tigre, se ré[>ètent à l’intini. KarcmenI on trouve un sentiment vrai derrière les ex])ressious violentes : toutes ces souffrances sont d’une fausseté criarde. C’est une

poésie artificielle, une affaire de mode, et les modes sont, comme tout le monde sait, bien plus stal)les en Orient qu’en Europe. Pour ces poètes de la cour, frivoles, libertins, il n’aura pas été difficile de se i)rocurer, à l’exemple d’un

Rudagî ou d’un ’Un.’^uri, lu faveur des femmes pour leur solde princière.

La i)oésie d’amour a toujours été en vogue aux cours, et on a bien des exemples, ({u’un petit vers larmoyant a valu à fauteur une petite fortune en jùèces d’or. C’est

pounjuoi on ne trouve pas chez ’Omar Hayyfim des vers de cette espèce : il n’était })as poète de profession, il ne mettait l)as sa veine poétifjue au service des cours. Il y a plus de vérité dans le sentiment de la nature des poètes i)ersans.

Mais ce sentiment est aussi superficiel et ne laisse pas de prendre un train de routine. Chez les poètes

de la première période de la littérature persane, quel([ues observations fines et originales se rencontrent çà et là comme les petits vers suivants de l’émir Abû-1-Hasan ’Alï Alagâcî : Jette un regard sur cette armée de flocons de neige qui flottent dans l’air.

Exactement comme des colombes blanches qui volètent eflfarées de peur du faucon-.

Nâsir-Husrau <jui a su mieux (lu’aucun autre poète persan donner à sa poésie une erai»reinte i>ersonnelle, a dépeint dans un qasïda magnificiue la tempête automnale ([ui ^

Turîh-i guzida (Browne, JRAS. 1900 p. 756). Notez que les quatre éléments figurent dans chaque distique : c’est une finesse très goûtée j^ar les Persans.

^

Ethé, Morgenl. Forschungen 1875.