Page:Recherches sur les Rubāʿiyãt - Arthur Christensen.djvu/80

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Deuxit’iiie Partie.

Tantôt il implore un regard gracieux : () Seigneur ! prête-moi un regard, car la tête me tourne ! sois gracieux envers moi, car je suis décliiré et confus ! Ne me truite pas comine je le mérite, mais traite-moi de ta grâce et de ta miséricorde ordinaires. (Ethé no. 52.)

Tantôt il gémit <lo la doulenr de l’absence et de la dureté de l’amie :

Ù douleur ! toi qui as déchiré le voile de ma i)atience, tu as vu ma faiblesse, et tu m’as rendu tout courl)é. La nuit est sombre, et l’amie est loin, et je n’ai pas de confldent. Ù douleur de la séparation ! tue-moi, car tu m’a trouvé sans appui.

(Ethé no. 87.)

’Abd-alliîh Ansârî exprime quelquefois l’amour mystique d’une façon plus paradoxale, comme dans ce vers-ci : Si je trouvais, à l’enfer, l’union avec toi, j’aurais honte de l’état des habitants du paradis. L’ivresse de vin devient, comme l’amour, le symbole de l’extase^ :

Ne me fais pas des reproches, ô maître, si je bois du vin et m’occupe tant d’amour et d’adoration du vin. Tant que je suis à jeun, je me trouve assis parmi des étrangers ; quand je suis ivre, je repose dans les bras de l’ami. (Alni Sa’id, Ethé no. 13.)

«Aller dans la taverne (harahaf)» veut dire : chercher la connaissance de Dieu ; et le nom de «débauché» ou «buveur» (rind) est le nom d’honneur du mystique. Toi qui n’as pas étudié la science céleste, toi qui n’es jamais allé dans la taverne,

toi qui ne sais pas ce qui te profite et ce qui te nuit, comment pourras-tu venir parmi les hommes de Dieu ? hélas, hélas ! (Baba Tahir, Huart nO. 1 .)

Devant cette religion d’amour profonde et passionnée toutes les formes extérieures n’ont aucune valeur : si l’amour de Dieu y est, toutes les confessions sont égales : ’

L’extase est appelé r«état» (haï) par excellence.