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Caract^re national et vie litti-raire. 75

(lifiant un peu : il donne aux intellects le nom d’anges. Il

soutient fermement rimi)ortance de la morale et ne s’occupe pas de la question de la volontr libre. Mais à côt( de ces tendances principales il y a eu alors connue aujourd’hui une infinité d’hérésies, de restes d’anciennes reli^Mons, de systèmes éclectiques formés d’éléments perses, indiens, sémitiques et grecs. Encore le Persan ne se

tient-il i»as h une seule théorie ; il passe d’une foi h une autre, éprouvant tout, prêtant l’oreille aux doctrines supranaturalistes les plus contradictoires. La combinaison des

idées hétérodoxes est facilitée par les théories de l’interprétation allégorique (ta’vil, hâtin), et le caractère hérétique de ces idées est caché par le kctmân. Il en résulte une certaine confusion.

Une couche se superi)0se sur l’autre dans son esprit, et si les nouveaux dogmes délogent les anciens, ils ne peuvent pas vaincre certaines conséquences des anciens dogmes, qui n’existent que par ceux-ci. Les Persans ne coml »rennent pas l’utilité d’un système logique et conséquent, ils adoptent tout avec intérêt.

«C’est l’usage immodéré de la mé-

thode inductive qui a amené cette disposition morale. Elle

a aiguisé les intelligences très-finement, mais, en même temps, elle les a trempées d’une sorte de scepticisme inconscient qui résulte du besoin même de ne pas mettre de bornes à la curiosité métaphysique. Elle a montré tant de choses diverses, elle i)romène si bien les imaginations au milieu des i)aysages les plus variés, elle est toujours si disposée à les conduire au fond des abîmes ai)rès les avoir fait planer au plus éthéré dus hauteurs, qu’il ne reste })lus ni l’envie, ni le besoin, ni le tcmj)S de s’attacher définitivement à aucun des résultats qu’elle présente. On se laisse bercer dans cette vague atmosphère, ou mieux, l’on éprouve sans cesse le sentiment qui fait marcher avec joie les voyageurs dans certaines contrées de montagnes ; le chemin est étroit, sans horizon, la route invisible ; les rochers s’élèvent à droite et à gauche, menaçant de dérober la vue du dernier lambeau d’axur qui domine leur sommet ; on ne sait comment on sortira ; on avance