Page:Reclus - Étude sur les fleuves, 1859.djvu/27

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biter les eaux rapides qui lui descendent des champs de neige et des glaciers ; il est donc obligé d’augmenter sa pente et de hausser son lit par un ensablement régulier dans la partie supérieure du ci-devant lac. À l’autre extrémité du lac, dans sa partie la plus basse, se montrent des phénomènes tout opposés. Là une pente très prononcée, souvent même des courants rapides ou une cataracte, succèdent brusquement à la surface horizontale de l’étendue lacustre, et l’eau, par suite des simples lois de la pesanteur et de la friction, ronge incessamment le rebord inférieur du bassin qui la contient ; ce rebord inférieur recule donc sans cesse et diminue d’autant la hauteur du lac ; en même temps la pente de la rivière devient de moins en moins rapide, en raison directe de l’abaissement de son niveau. À l’extrémité supérieure du lac, le lit de la rivière se hausse et le bassin se comble ; à l’extrémité inférieure, le lit se creuse et le bassin baisse de niveau ; à la fin, les deux lits se rencontreront à mi-chemin, et le lac aura cessé d’exister.

Une fois le lac desséché, d’autres régulateurs interviennent pour recevoir le trop-plein des eaux dans les saisons pluvieuses et le reverser dans le lit du fleuve pendant les saisons de sécheresse ; ces régulateurs sont les marais qui accompagnent à droite et à gauche les cours d’eau laissés encore à l’état de nature. C’est ainsi que les marais longeant le Mississipi, le Marañon, le Parana, absorbent pendant les inondations une grande partie des eaux de la crue ; quand le niveau des eaux a baissé dans le fleuve, les marais rendent ce qu’ils ont reçu et servent à maintenir la hauteur régulière de l’étiage.