Page:Reclus - Étude sur les fleuves, 1859.djvu/33

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

5 mètres cubes de limon par seconde. Le Nil, si fameux par ses alluvions fertilisantes, les laisse presque toutes dans les campagnes qui le bordent et n’en porte jusqu’à la mer qu’une faible partie ; aussi n’avance-t-il que de 4 à 5 mètres par an et l’exhaussement du terrain produit par les eaux du Nil ne dépasse-t-il pas 0m,132 par siècle. Malgré le peu de longueur de son cours, le Pô est un des fleuves travailleurs les plus remarquables du monde entier : l’affaissement graduel des rives de l’Adriatique, affaissement que Schielden évalue à 2 mètres au moins depuis la fondation de Venise, ne l’a pas empêché d’avancer de 70 mètres par an pendant les deux siècles derniers. La pointe actuelle se trouve à 23 kilomètres du méridien d’Adria, ville qui se trouvait autrefois sur le bord de la mer Adriatique et qui lui a même donné son nom. Ces énormes travaux accomplis par un fleuve aussi peu considérable ne doivent pas étonner, si l’on réfléchit que le Pô endigué par des levées, de Plaisance à la mer, est obligé de transporter toutes ses alluvions à son embouchure, tandis que le Nil, le Gange et nombre d’autres fleuves travailleurs se répandent lors de chaque inondation sur une immense étendue de terrain. Quant au Mississipi, il est difficile de déterminer de combien il empiète annuellement sur le golfe du Mexique ; depuis que l’homme civilisé a colonisé ses bords, l’économie du fleuve a tellement changé, que les appréciations les plus diverses ont été faites sur ses progrès annuels. Pendant les cent dernières années, ce progrès a été de 20 mètres par an ; mais il est devenu plus considérable depuis que la construction des levées