Page:Reclus - Étude sur les fleuves, 1859.djvu/34

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empêche l’eau de s’épandre latéralement dans les campagnes, et force toutes les matières terreuses en suspension à descendre vers l’embouchure.

L’influence du travail de l’homme sur la vie des fleuves est énorme, car par la culture on peut augmenter ou diminuer d’une manière très considérable la masse d’eau qui s’écoule dans leurs lits. En défonçant et en labourant les vastes savanes où l’eau glisse sur l’herbe sans pénétrer dans la terre, le colon s’empare au profit de ses cultures d’une grande quantité d’eau qui autrement eût été grossir la masse des rivières ; c’est ainsi que plusieurs cours d’eau de l’Amérique du Sud diminuent de volume d’année en année, à mesure qu’on en cultive les bords. Dans d’autres pays, au contraire, où l’on prend à tâche de drainer et de dessécher les terrains trop humides, la quantité d’eau augmente dans les artères fluviales. En Angleterre le drainage souterrain est devenu presque universel, et chaque goutte d’eau qui n’est pas absorbée par les vaisseaux des plantes, trouve une pente artificielle ou naturelle vers le ruisseau voisin ; aussi la masse des eaux courantes est-elle devenue beaucoup plus forte qu’auparavant. De même aussi nous pouvons prédire qu’en Allemagne, où le volume des eaux du Weser, de l’Elbe, de l’Oder, de la Vistule a constamment diminué depuis un siècle, par suite de la mise en culture de toutes les campagnes, ce volume augmentera de nouveau en proportion des travaux de drainage entrepris pendant le siècle actuel. Prenons encore l’exemple du Mississipi, et supposons que l’on dessèche les vastes marais situés sur ses bords ; aujourd’hui ils absorbent