Page:Reclus - Étude sur les fleuves, 1859.djvu/7

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Que la gorge soit large de plusieurs kilomètres ou seulement de quelques centaines de pieds, les glaces douées d’une certaine viscosité s’épandent en largeur ou s’accumulent en profondeur, comme le feraient les eaux d’une rivière, et plus encore que les eaux, elles rongent leurs bords, creusent de profonds sillons dans le roc vif, et emportent souvent d’énormes quantités de débris, comme de grossières alluvions. Les rochers granitiques parsemés dans les campagnes de la Prusse et de la Finlande témoignent du pouvoir énorme de translation que possédaient les glaciers scandinaves, et nous savons que les montagnes de glace du continent austral, en se détachant des glaciers où elles se sont formées, entraînent également d’immenses débris.

De la base de la muraille perpendiculaire ou du milieu des blocs amoncelés du glacier jaillit un torrent que d’innombrables gouttelettes ont contribué à former et qui sourdait déjà depuis longtemps dans un tunnel sous-glacial. Ce torrent ne tarit jamais, car il est alimenté par ces énormes réservoirs de neige et de glace qui couvrent les sommets et remplissent les gorges, donnant à la fois l’eau qu’a fondue la chaleur du soleil dans les couches supérieures de neiges, et l’eau qui provient de l’action de la chaleur terrestre sur les couches inférieures.

Cependant toute l’eau produite par la fonte des neiges et des glaces ne s’écoule pas dans le torrent du glacier, mais de nombreux filets d’eau filtrent à travers les fissures des rocs, se réunissent dans les anfractuosités et les cavernes des montagnes, et forment des cours d’eau souterrains plus ou moins considérables. Souvent ceux-