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FRANCE.

manciers, des patriotes ont réveillé la nation du bas Escaut ; depuis qu’ils ont des journaux, des orphéons, des théâtres, et qu’ils ont obtenu pour leur idiome l’égalité de droits avec le verbe de Paris. Et cependant le flamand périra sans doute : même avec le hollandais, son frère, c’est une petite langue, parlée par peu de millions, et le français est une grande langue, voire une des premières sur terre. Les Wallons habitent un lambeau de la Flandre Occidentale, le Hainaut, l’arrondissement de Nivelles, qui tient le midi du Brabant, les provinces de Namur et de Liège, et le Luxembourg Belge, sauf quelques villages allemands dans les environs de Bastogne et d’Arlon.

Dans quelques lieux de la Prusse rhénane, sur les frontières des Wallons de Liège, autour de Malmédy, dans les Hautes-Fagnes, sur les hauts plateaux argileux et froids où se forme l’Amblève, rivière dont les eaux gagnent l’Ourthe, affluent de la Meuse à Liège. Ces Wallons prussiens ne sont pas plus de onze mille.

Dans le Luxembourg Hollandais règne un dialecte allemand dur, mais original et plein de saveur ; pourtant le français y a rang de langue officielle, et voici pourquoi : ce Luxembourg d’idiome germanique est le démembrement d’un Luxembourg plus vaste où les Wallons avaient la majorité : Wallons que se sont partagés depuis la Belgique et la France.

Dans la Suisse française, dans l’occident de l’Helvétie. Sur environ 2 670 000 « petits-cousins de Guillaume Tell », près de 650 000 ont le français pour langue. Au recensement de 1861, sur 100 Suisses, 70 parlaient l’allemand, 23 le français, 7 l’italien et le romanche. Dix ans après, 69 parlaient l’allemand, 24 le français. Le cordeau de démarcation avec les durs patois du deutsch jargonnés par à peu près 1 850 000 Suisses, est fort sinueux : il passe entre Délémont et Lauffon, à l’ouest de Bienne et de Morat, qui sont « teutonnes », dans Fribourg, dont le haut quartier est français, le bas quartier tudesque, et où d’ailleurs notre langue domine,