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GÉOGRAPHIE.

impossibles à l’homme qui voit, toute sa vie durant, la rivière natale couler fidèlement au pied du même coteau, ou tomber du même moulin sur les mêmes pierres entre les mêmes arbres et les mêmes prairies ; mais le temps peut tout : avec les siècles un torrent use une montagne aussi facilement qu’il comble un lac.

S’il est vrai que le Rhône coulait où coule de nos jours l’Isère, dans ces temps reculés la Grande-Chartreuse et divers massifs calcaires de la Savoie tenaient au Jura ; et sous nos yeux, au delà même de l’Isère, c’est encore le Jura, qui, sous le nom d’Alpes, pousse, vers le midi, des montagnes dont les roches ont la texture des chaînons jurassiens.




IV. LES ALPES


1o Les Alpes en Europe. — Il y a dans le monde, en Asie, en Amérique, en Afrique, des monts plus élevés que les Alpes, mais il n’en est pas de plus beaux.

Le « Palais des neiges », l’Himalaya, dresse contre le ciel un pic double du Mont-Blanc, le Gaurisankar, haut de 8 840 mètres ; Les Andes ont des pics de 7 000 mètres, et dans ce que nous connaissons de l’Afrique une montagne se dresse à 1 300 mètres au-dessus du monarque des Alpes. Mais l’Himalaya est sinistre, les Andes sèches et stériles, et les Monts Africains, plus vivement éclairés, n’offrent pas au soleil tropical d’aussi vastes champs d’éclatantes froidures.

Leur nom vient-il d’un radical alb, signifiant blanc ? Il serait mérité, tant il y a d’étincelants névés et de glaciers poudrés de neige sur les épaules de leurs géants. L’hiver éternel y luit sur des centaines de milliers d’hec-