l’angle d’un promontoire a peut-être disparu, la direction du couloir d’avalanche s’est peut-être modifiée, une lisière protectrice de forêt a cédé sous la pression des neiges, et, par suite, toutes les prévisions du montagnard se trouvent déçues.
Par les mille colonnes pressées de leurs troncs, les bois sont l’une des meilleures barrières contre la marche des avalanches, et nombre de villages n’ont pas d’autre moyen de défense contre les neiges. Aussi de quel respect, de quelle vénération presque religieuse regardent-ils leur bois sacré ! L’étranger qui se promène dans leurs montagnes admire cette forêt à cause de la beauté de ses arbres, du contraste de sa verdure avec les neiges blanches ; mais eux, ils lui doivent la vie et le repos ; c’est grâce à elle qu’ils peuvent s’endormir tranquillement le soir sans craindre d’être engloutis pendant la nuit ! Pleins de gratitude envers la forêt protectrice, ils l’ont divinisée. Malheur à qui touche de la cognée l’un de ses troncs sauveurs ! « Qui tue l’arbre sacré tue le montagnard, » dit un de leurs proverbes.