Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/13

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son eau s’enfuir sous l’ombre des trembles, où nous avons vu se balancer ses herbes serpentines et frémir les joncs de ses îlots ? La berge fleurie où nous aimions à nous étendre au soleil en rêvant de liberté, le sentier sinueux qui borde le flot et que nous suivions à pas lents en regardant le fil de l’eau, l’angle du rocher d’où la masse unie plonge en cascade et se brise en écume, la source bouillonnante, voilà ce qui dans notre souvenir est le ruisseau presque tout entier. Le reste se perd dans une brume indistincte.

La source surtout, l’endroit où le filet d’eau, caché jusque-là se montre soudain, voilà le lieu charmant vers lequel on se sent invinciblement attiré. Que la fontaine semble dormir dans une prairie comme une simple flaque entre les joncs, qu’elle bouillonne dans le sable en jonglant avec les paillettes de quartz ou de mica, qui montent, descendent et rebondissent en un tourbillon sans fin, qu’elle jaillisse modestement entre deux pier-