Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/146

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d’un microscope pour en voir les sinuosités et les tourbillons. Dans le lit, tortueux lui-même, et sous les arbres qui l’ombragent, tout se meut en cercles, en remous, en spirales : les herbes du fond, chevelures onduleuses, les rides de la surface, les libellules qui volent au-dessus des joncs, qui se rencontrent, puis se séparent pour se rencontrer encore, les moucherons qui tournoient dans une ronde sans fin, le vent qui passe en dessinant en noir sur la nappe brillante des bouffées circulaires ; je ne vois que courbes gracieusement entre-croisées, que cercles enlacés, que figures aux contours flottants. Ainsi que l’indiquent les plongeons et les émersions successives de la feuille entraînée, l’eau qui vient de descendre vers le fond, remonte par une nouvelle courbe vers la surface, s’étale à la lumière, puis disparaît encore au-dessous de courbes liquides, qui, elles aussi, viennent de couler vers le fond du lit. Sous l’impulsion du courant, les molécules d’eau changent incessamment leur position respec-