Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/226

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des regards de haine et des paroles d’insulte, car on se souvenait des combats et des massacres, des victimes étranglées, noyées, ensevelies vivantes ; mais quand les guerriers rouges, dépouillant leur tunique, pareille à celle des Hellènes d’autrefois, apparaissaient dans la beauté resplendissante de leurs formes et s’élançaient dans la rivière pour la traverser en quelques élans, on oubliait l’antique haine et l’on se prenait même à les aimer. Malgré tout, n’étions-nous pas des frères ? Eux aussi, me semble-t-il, nous regardaient sans colère, mais en abordant la rive, ils secouaient leur longue chevelure noire, s’éloignaient fièrement sans retourner la tête et disparaissaient bientôt à un tournant de la plage.