Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/49

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quand il aperçoit le plateau qui portait autrefois les murs de Troie et voit sa propre image se refléter, soit dans les sources fameuses du Scamandre, soit dans l’eau du petit fleuve Simoïs, où faillit périr le vaillant Ajax, bien pauvre est son imagination, bien rebelle est son cœur s’il ne se sent profondément ému à la vue de ces flots que le vieil Homère a chantés ! Et que doit-il éprouver en visitant ces fontaines de Grèce, aux noms harmonieux, Callirhoé, Mnémosyne, Hippocrène, Castalie ? L’eau qui s’en écoulait et qui s’en échappe encore est celle que les poètes regardaient avec amour comme si l’inspiration s’était élancée du sol en même temps que les sources ; c’est à ces filets transparents qu’ils allaient boire en rêvant d’immortalité, en cherchant à lire les destinées de leurs œuvres dans les rides du bassin et les vaguelettes de la cascatelle.

Quel est le voyageur qui n’aime à reporter sa pensée vers ces sources célèbres, s’il a eu le bonheur de les contempler un jour ! Quant à