Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/63

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pendant le jour pénètrent dans le sol jusqu’au rocher et de grain de sable en grain de sable, de cristal de quartz à molécule d’argile, descendent imperceptiblement le long des pentes ; elles se rapprochent, elles deviennent gouttes, puis, se réunissant les unes aux autres, ce sont des filets liquides qui glissent souterrainement au-dessous des racines du gazon ou même dans les fissures de la roche sous-jacente. Puis quand viennent les premières chaleurs de l’année, la neige se fond rapidement en eau pour gonfler les ruisselets cachés, et l’herbe que l’on dirait torréfiée par un incendie, reparaît à la lumière et verdoie de nouveau.

Si la montagne était fracturée de lézardes profondes, les eaux s’engouffreraient dans ces fentes et ne rejailliraient que bien loin dans la plaine, ou même elles ne ressortiraient point de la terre ; mais non, la roche est compacte et fendillée seulement à la surface, l’eau courante ne s’y enfonce pas, et voici que, tout à coup, dans une dépression