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l’homme et la terre. — la culture et la propriété

les découvertes fondamentales étaient faites, l’homme broyait le grain et pétrissait la pâte qui se change en vie ; il avait aussi des amis, des associés, des serviteurs parmi les animaux : son monde s’était infiniment agrandi par celui de la flore et de la faune vivantes. On peut même remonter dans les âges antérieurs à la faune actuelle pour y retrouver les indices de l’association faite de gré, de ruse ou de force entre l’homme et d’autres bêtes. Les découvertes faites dans une grotte voisine de la baie Ultima Speranza, au milieu des archipels magellaniques, ne laissent point de doute à cet égard. Il est certain qu’avant la dernière période glaciaire les troglodytes de l’Amérique Méridionale possédaient déjà un animal domestique le grypotherium domesticum, un édenté gravigrade, qui depuis longtemps a cessé d’exister : d’épaisses couches de fumier d’environ 2 mètres, couvrant un espace de 2 600 mètres carrés dans la grotte que ces animaux habitaient à côté des hommes, prouve qu’on les élevait en véritables troupeaux[1].

la grande grotte d’ultima speranza

Comme toute évolution, celle des relations de l’homme avec les autres espèces vivantes, végétales et animales, comporte certains reculs. La culture ne s’est pas enrichie, améliorée d’un mouvement égal et continu ; à certaines époques, elle s’est au contraire très appauvrie. Pour la domestication des animaux il est certain que l’humanité se

  1. R. Hanthal, Revista del Museo de la Plata, tome IX, pp. 409 et suiv.