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teurs de la jeunesse, les ouvriers de crime et d’iniquité ». Ces maudits, ces anathèmes, ce sont, en premier lieu, ceux qui se disent hommes de révolution, anarchistes ou libertaires.

C’est bien ! Il est juste ! il est légitime que des gens se disant et se croyant même sacrés pour exercer la domination absolue sur le genre humain, s’imaginent qu’ils sont les possesseurs des clefs du ciel et de l’enfer, concentrent toute la force de leur haine contre les réprouvés qui contestent leurs droits au pouvoir et condamnent toutes les manifestations de ce pouvoir : « Exterminez ! exterminez ! » telle est la devise de l’Église, comme aux temps de Saint Dominique et d’Innocent III.

À l’intransigeance catholique, nous opposons égale intransigeance, mais en hommes et en hommes nourris de la science contemporaine, non en thaumaturges et en bourreaux. Nous repoussons absolument la doctrine catholique, de même que celle de toutes les religions connexes, amies ou ennemies ; nous combattons leurs institutions et leurs œuvres ; nous travaillons à détruire les effets de tous leurs actes. Mais cela sans haine de leurs personnes, car nous n’ignorons point que tous les hommes sont déterminés par le milieu dans lequel leurs mères les ont bercés et la société les a nourris ; nous savons qu’une autre éducation, des circonstances moins favorables auraient pu nous abêtir aussi, et ce que nous cherchons par dessus tout, c’est précisément de faire naître pour eux, — s’il en est encore temps — et pour toutes les générations à venir, des conditions nouvelles qui guériront enfin les hommes de la « folie de la croix » et autres hallucinations religieuses.

Nous ne songeons point à nous venger quand viendra le jour où nous serons les plus forts : les échafauds et les bûchers n’y suffiraient point, tant les Églises ont massacré d’infidèles au nom de leurs dieux respectifs, tant l’Église chrétienne tout spécialement a fait de victimes pendant quinze cents années de domination. La vengeance n’est point dans nos principes, car la haine appelle la haine et nous avons hâte d’entrer dans une