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l’homme et la terre. — palestine

de préparation dont les ancêtres des Hymiarites auraient été les pionniers. On considère aussi le Yemen comme le pays natal des ouvriers qui, il y a plusieurs milliers d’années, travaillèrent aux mines d’or du territoire de Sofaia. Toutefois, restant dans le domaine historique, il faut constater que sont encore peu nombreux les renseignements précis permettant d’affirmer des relations directes de l’Arabie Heureuse, d’une part avec la Mésopotamie, d’autre part avec les monts africains où naît le Nil bleu, et le désert de Nubie. Le nom le plus ancien que l’on puisse citer est celui du roi Hammurabi. Certains indices relevés par l’archéologue Pinches dans des textes cunéiformes permettent de supposer que ce personnage, conquérant et législateur, était d’origine hymiarite[1]. Hammurabi, contemporain de l’Elamite Khador-Laomer, s’empara de Babylone, il y a quatre mille ans, et en fit, pour la première fois dans l’histoire, la capitale d’un royaume uni : à cette époque lointaine, les populations de l’Arabie méridionale, servies peut-être par des conditions climatiques plus favorables que celles de nos jours, étaient donc politiquement assez puissantes pour qu’il leur fût possible d’intervenir dans les destinées de la Mésopotamie par la force des armes.

Dix ou onze siècles après, la légende nous parle d’une fastueuse reine de Saba, la resplendissante Balkis, qui visita Salomon, attirée par son grand renom de sagesse, et lui « posa des questions difficiles[2] », merveilleusement résolues par lui, et à son grand profit, puisqu’en partant la reine lui donna « cent vingt talents d’or, des épices en très grande abondance et des pierres précieuses ». Les généalogies légendaires de l’Arabie et de l’Abyssinie rattachent plusieurs familles actuelles à Salomon et à la reine de Saba, entre autres celle du « roi des rois », l’empereur d’Ethiopie.

Le nom de « Sabéens » donné fréquemment à la population qui obéissait aux souverains trônant dans la ville de Saba est encore souvent employé pour désigner les adorateurs des astres, surtout des planètes, auxquelles on attribuait une influence décisive sur la destinée des hommes et des empires. Pareil culte était bien fait pour se développer sur le haut observatoire des monts Yemen, d’où l’on contemple

  1. A. H. Sayce, Patriarchal Palestine, VII.
  2. Livre des Rois, chap. X. v. 1 à 10.