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phéniciens et grecs en égypte

partie de leur existence commerciale, avidement accepté la suzeraineté profitable des Pharaons, les bouches du Nil étaient ouvertes à leurs marins, et grâce à ceux-ci le mouvement des échanges avec l’extérieur se faisait en toute liberté. Heureux de leur vasselage, les Phéniciens
Musée du Louvre.Cl. Giraudon.
bijoux égyptiens, époque saïte
possédaient le monopole du trafic entre l’Orient et l’Egypte et, d’autre part, ils pouvaient en pays lointain se réclamer du prestige d’une puissante monarchie ; ils naviguaient, comme on dirait aujourd’hui, « sous pavillon égyptien »[1], et c’est sur l’ordre d’un Pharaon, Niko, que s’accomplit, il y a vingt-cinq siècles, la circumnavigation de l’Afrique, le grand exploit géographique de l’antiquité.

Mais à cette époque, l’Egypte n’était plus l’Egypte ; elle appartenait déjà au monde œcuménique de la Méditerranée où la lumière de la Grèce commençait à briller comme un phare. Sous la pression de la civilisation extérieure, la vallée du Nil était obligée de s’ouvrir, comme l’ont fait de nos jours la Chine et le Japon, comme ne manquera pas de le faire le plateau du Tibet. Au lieu d’accueillir simplement en hôtes les étrangers, on était même forcé d’avoir recours à eux, de leur demander conseil et direction. Une ville complètement grecque, Naucratis, peuplée surtout de Phocéens et d’autres Hellènes de la côte occidentale d’Asie, s’était élevée sur la bouche canopique du Nil ; Tahpanhes ou Daphnæ, également grecque, avait

  1. Georges Perrot et Gh. Chipiez, Histoire de l’Art dans l’Antiquité, t. III, p. 28, 29.