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civilisation de zimbabyeh

édifices, bien supérieurs en architecture aux constructions informes élevées par les indigènes de nos jours. Parmi les voyageurs modernes, Cari Mauch le premier, en 1871, retrouva l’un de ces fameux débris, témoignage d’une civilisation avancée : Zimbabyeh, c’est-à-dire « Résidence Royale »[1], tel est le nom que les naturels donnaient à ce groupe de constructions antiques, situé sur des collines du haut Sabi, à 300 kilomètres environ à l’ouest de Sofala. Les fragments de bâtisses, réparties sur près d’un kilomètre carré, comprennent l’ « acropole » et nombre de petits édicules, dont le « temple elliptique », de 60 mètres sur 80, qui contient une tour conique, primitivement de 12 mètres de hauteur de maçonnerie pleine.

Dans les édifices les plus anciens d’entre Zambèze et Limpopo, tous ces murs sont construits en granit, avec des matériaux de petite dimension, bien taillés et juxtaposés sans mortier. Les parements extérieurs sont généralement décorés, quelques rangées de pierres plates étant disposées suivant un motif simple, et, fait qui témoigne d’une grande habitude de ces travaux, il a été pourvu au drainage des terrains enclos avant toute édification. Les constructions se développent suivant des lignes courbes, sinueuses même, avec des portes étroites, des redans et fréquence de couloirs étroits encadrés de hauts murs. Il est certain que les maçons de ces travaux comprenaient admirablement la défense des places, mais d’autres détails de leur œuvre — les tours et les monolithes — indiquent des préoccupations religieuses ; de même que les excavations innombrables montrent la recherche de l’or comme ayant été la raison profonde de l’occupation du pays.

La légende attribuerait-elle avec raison les nombreuses ruines de la contrée aux architectes d’un souverain puissant régnant autrefois sur un très vaste royaume de l’Afrique orientale ? Lors de l’arrivée des Portugais sur les rivages de la mer des Indes, un Monomotapa, c’est-à-dire un Muené Motapa ou « Seigneur Auguste » tenait en effet tout le pays entre ses mains, et vraisemblablement une partie des constructions datent de cette période, mais on les distingue assez nettement de celles édifiées une vingtaine de siècles auparavant. Sans aucun doute, la région fut encore à une époque récente beaucoup plus peuplée qu’elle ne l’est de nos jours. Les admirables et fécondes vallées de

  1. D’après Keâne et Th. Bent ; « Maison de Pierre », d’après Selous.