Page:Reclus - La Commune de Paris au jour le jour.djvu/276

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
266
journal de la commune

République modérée, interposent leur arbitrage ! Tôt ou tard, les campagnards emboîtent le pas derrière les gens de leur chef-lieu qui ont eux-mêmes emboîté derrière Paris. Il ne serait donc que raisonnable et sensé de prendre les villes comme centre du mouvement de notre corps politique.

Ce serait une effroyable catastrophe que l’écrasement de Paris par l’armée de l’obéissance passive, à côté de cette immense nécessité de l’arbitrage, toutes autres exigences ne sont qu’insignifiantes. Si les villes ne peuvent plus prendre fait et cause pour Paris, comme la malheureuse Marseille l’avait essayé, comme Toulouse, Limoges et Lyon l’ont essayé, il faut que ces villes et toutes leurs sœurs imposent au moins la paix et la solution pacifique de l’immense problème des franchises communales.

Dès le lendemain de l’attaque par les Versaillais, Lille, la noble cité, avait donné l’exemple du bon sens, de la fraternité et de la justice. Dès le 5 avril, elle signait une délibération solennelle dont elle envoya copie au Président de l’Assemblée Nationale et au Chef du pouvoir exécutif de la République française :

… « S’élevant au-dessus des passions et des haines, si tout le monde consent à écouter la voix du patriotisme et de la raison, l’apaisement peut s’opérer, mais sous certaines conditions essentielles.

« Il faut, sans plus de retard, consacrer les vœux unanimes du pays par une loi municipale qui rende à toutes les communes, petites et grandes, le droit de choisir leur maire et par une loi électorale qui permettra aux villes d’échapper aux majorités rurales, et d’avoir, elles aussi, leur représentation.

« Il faut, en même temps, et par dessus tout, rechercher, au milieu de tous les désaccords, l’affirmation politique qui groupera le plus grand nombre de volontés communes : l’affirmation de la République. Menacer la République ou continuer à laisser planer des doutes sur la durée de son existence, ce serait tout remettre au hasard et jeter dans le pays de nouveaux brandons de discorde. Mais asseoir la République sur des bases inébranlables, c’est entrer dans la voie de concorde et de salut ; c’est assurer à la France, dans le présent comme dans l’avenir, l’ordre et la liberté. »