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journal de la commune

sans ménagement devant un auditoire composé en grande partie de femmes et d’enfants. On y entend les blasphèmes les plus audacieux, les impiétés les plus révoltantes contre Dieu et la religion. Les accusations les plus odieuses et les plus absurdes contre le clergé, cent fois réfutées, y sont renouvelées du haut de la chaire, par des orateurs qui se font gloire d’outrager ce que toute âme honnête, je ne dis pas chrétienne, se fait un devoir de respecter. En un mot, la plume se refuse à décrire le délire de licence et d’impiété auquel se livrent des hommes qui, tout en proclamant la liberté des cultes, outragent dans le lieu même qui leur est consacré, les croyances des fidèles. Il est de notre devoir de nous interdire tout exercice du culte dans la partie ainsi profanée tant que ces scandales dureront et qu’une cérémonie expiatoire n’aura pas eu lieu. C’est pour que l’opinion publique inflige dès à présent à ceux qui en sont les auteurs les flétrissures qu’ils méritent, que nous en livrons le récit à la publicité »… Les prêtres de Saint-Nicolas des Champs.

Ce qui avait si fort indigné les prêtres de Saint-Nicolas des Champs, c’est que la question traitée dans leur église eût été celle du divorce, pour la possibilité duquel citoyens et citoyennes s’étaient unanimement prononcés. Or le divorce est une abomination aux yeux de l’église catholique, laquelle déclare le mariage un sacrement et un lien indissoluble.

Peu de théâtres ouverts. Presque personne n’y va. Le moyen d’aller écouter une tragédie en cinq actes, des gaudrioles ou des calembours quand nos murailles vibrent et tremblent sous l’effort furieux des boulets de fonte et d’acier. Si elles cèdent, si elles cèdent !…

Mais écoutons plutôt les discours patriotiques qui promettent la victoire, les harangues ardentes qui promettent qu’au moins Paris combattra jusqu’à la mort. Avant de se séparer, quelque voix mâle et vibrante entonne la Marseillaise ou le Chant du Départ, et des centaines de voix emplissent les voûtes sonores de ces hymnes insolites. Ce sont les cantiques de la Révolution française : religion contre religion, fanatisme contre fanatisme, disent les bourgeois avisés qui ont encore assez de liberté d’esprit pour aller rire plutôt au Palais Royal et goguenarder au Chapeau de paille d’Italie.