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les inoïts occidentaux.

La mère, qui perd son nourrisson, dépose le pauvre « papouse » dans une boîte élégamment ornée qu’elle se met sur le dos, pour la porter un long temps. Souvent elle prend la triste larve dans ses bras, enlève les moisissures, la désinfecte, lui fait un brin de toilette. Les primitifs tiennent la vie pour indestructible, la mort pour un changement d’état. Les animaux vont habiter l’autre monde, en attendant qu’ils retournent dans le nôtre. Immortel le ciron, éternels les moustiques. Le mort se fait suivre de tout son attirail de pêche ; il s’en servira. Les outils et vêtements qu’il n’emporte pas, les objets d’usage personnel restent en sympathie avec lui ; aussi leur contact donne froid, leur vue inspire la tristesse.

Des Koloches, plus simplistes que leurs voisins, affirment la métempsycose pure et simple. La mort, disent-ils, n’est qu’une dissolution momentanée, elle dure le temps qu’il faut à l’âme chassée de son domicile pour en trouver un nouveau dans un corps d’homme, de loup ou de corbeau — il n’importe. Muer en cachalot… quelle félicité ! Les malades et les infirmes demandent souvent qu’on les tue au plus tôt, pour renaître jeunes et vigoureux.

Suivant la croyance généralement adoptée, l’âme a le choix entre deux séjours outre-tombe : celui d’en haut, Coudli-Parmian ; celui d’en bas, Adli-Parmian, au fond de la mer. Le dernier est le préférable de beaucoup, dans une zone de ciel inclément et de terre inhospitalière, où presque toute la nourriture vient de l’Océan. Les Guinéens, aussi, croient savoir que les âmes continuent leur existence dans les profondeurs marines. L’Esquimau se croit perdu s’il s’éloigne un peu des côtes, le cœur lui manque quand il ne se sent plus à proximité des morses